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Le lien entre un sénateur thaïlandais et un marchand d'armes birman, possiblement mafieux, ébranle le système judiciaire thaïlandais

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Le système judiciaire thaïlandais a subi de graves dégâts car une série de révélations a montré que des juges et des policiers de haut rang tentaient d'épargner à un "sénateur puissant" des poursuites pour trafic de drogue et blanchiment d'argent après l'arrestation du marchand d'armes birman Tun Min Latt.

Le président de la Cour suprême, Chotiwat Luengprasert, a ordonné une enquête pour déterminer si les hauts magistrats du tribunal pénal avaient abusé de leur pouvoir en annulant le mandat d'arrêt émis contre le sénateur Upakit Pachariyangkun l'année dernière.

Selon le porte-parole de la Cour de justice, Sorawit Limparangsri, une commission d'enquête a récemment été mise en place pour recueillir des informations dans un délai de 30 jours mais elle n'a pas le pouvoir d'interroger les personnes responsables conformément au code pénal, a-t-il déclaré.

Le sénateur est accusé d'avoir eu des relations d'affaires avec Tun Min Latt, arrêté avec trois ressortissants thaïlandais en septembre dernier et inculpé en décembre pour trafic de drogue et blanchiment d'argent.

Tun Min Latt, ami du chef de la junte du Myanmar Min Aung Hlaing, a négocié depuis longtemps des accords d'armement avec la Chine et Israël pour l'armée du Myanmar, également connue sous le nom de Tatmadaw.

Le sénateur thaïlandais a été impliqué dans de nombreuses entreprises avec Tun Min Latt, y compris un "casino" (en fait un "lieu de plaisirs") à Tachilek au Myanmar sous le nom d'Allure Group depuis 2000. Upakit a déclaré qu'il avait cédé sa participation dans Allure Group et vendu pour 8,15 millions de dollars à l'un de ses associés avant de rejoindre le Sénat en mai 2019. L'opposition a déposé une pétition auprès de l'organisme anticorruption accusant le sénateur d'avoir fait une fausse déclaration de patrimoine.

Upakit a admis avoir des relations d'affaires le long de la frontière avec Tun qu'il ne pense pas impliqué dans le trafic de drogue.

Rangsiman Rome, député d'opposition Move Forward, a révélé le lien étroit entre le sénateur thaïlandais et le marchand d'armes du Myanmar lors d'un débat à l'Assemblée en février. Puis en mars, il a jeté un pavé dans la mare en prouvant que le 11 janvier des juges de haut rang avaient empêché l'arrestation d'Upakit.

Une lettre de sept pages signée le 5 mars par le détective du poste de police de Phya Thai, Le lieutenant-colonel Manaphong Wongpiwat, explique au comité de la Cour de justice que le tribunal correctionnel avait émis un mandat d'arrêt contre le sénateur à 11 heures le 3 octobre 2022. Le policier et son équipe auraient été rappelés au greffe du tribunal correctionnel quelques heures plus tard pour une réunion avec 10 juges. L'un d'eux, très important, aurait tenté de convaincre le policier de demander l'annulation du mandat.

"Ce serait illégal et contraire à la discipline policière de demander un mandat d'arrêt le matin et de demander sa révocation l'après-midi, je ne peux pas faire cela", a déclaré Manaphong dans sa lettre. Enfin, le mandat d'arrêt contre le sénateur a été révoqué par le juge en chef. Le policier a indiqué dans sa lettre que le sénateur pouvait ne pas être poursuivi pour les crimes présumés.
Une note officielle de "la justice" diffusée sur les réseaux sociaux le 14 mars, a déclaré que la décision de révoquer le mandat d'arrêt avait été prise car il avait été émis contre le règlement du tribunal.

En vertu du règlement, un mandat d'arrêt contre des VIP, telles que les ministres et les députés, ne peut être délivré qu'après consultation des "juges importants". Le juge qui a émis le mandat en question n'a pas réalisé que le suspect était un sénateur en exercice et donc proche du régime, indique la note.

Rangsiman a déclaré qu'il demanderait à la Commission nationale anti-corruption d'agir contre les hauts magistrats impliqués dans la résiliation du mandat d'arrêt.

L'avocat Achariya Ruangratanapong, qui a été poursuivi par le sénateur pour diffamation, a déclaré aux médias que l'équipe juridique du sénateur avait cité l'ancien chef de la police Suwat Jangyodsuk comme témoin dans l'affaire, alors qu'il n'avait aucune relation avec le cas du sénateur et de Tun Min Latt.

L'avocat a également soulevé des questions sur l'intention derrière le transfert des policiers qui étaient en charge de l'affaire Tun Min Latt à d'autres postes.

Le sénateur a déposé une plainte pour diffamation contre Achariya après que l'avocat s'est adressé au ministre de la Justice Somsak Thepsuthin et au bureau de lutte contre les stupéfiants, les appelant à enquêter sur les transactions financières d'Upakit. L'avocat a accusé le sénateur d'être impliqué dans le blanchiment d'argent lié au trafic de drogue et aux jeux d'argent en ligne illicites. Le blanchiment aurait servi à payer le siège du parti politique d’extrême droite de Prayut.

Rangsiman a déclaré aux journalistes qu'il avait déjà soumis toutes les preuves en sa possession au chef de la police nationale et à la brigade des Stups depuis la fin février, mais se demande pourquoi l'affaire n'avance pas. Le député a laissé entendre qu'un policier à la retraite, dont le nom commençait par un "S", avait exercé son influence pour s'immiscer dans le dossier du sénateur, dans le but de le tirer d'affaire.

Tun Min Latt, 53 ans, a été arrêté dans la capitale thaïlandaise Bangkok lors d'un raid l'année dernière avec trois ressortissants thaïlandais pour complot en vue de trafic de stupéfiants et blanchiment d'argent.

Après son arrestation, les autorités thaïlandaises ont saisi des actifs d'une valeur de 50 millions de dollars, notamment des biens immobiliers, de l'argent, des voitures et des montres de luxe. La police thaïlandaise a également découvert le titre d'un condo de luxe et des livrets bancaires appartenant au fils de Min Aung Hlaing (chef de la junte), Pyae Sone, et à sa fille Khin Thiri Thet Mon lors d'un raid chez Tun Min Latt le 11 janvier. Certains pensent que l'attitude positive que la junte birmane envers la Thaïlande (et vice versa ?) serait liée au fait que le royaume a saisi des actifs de la famille du chef de la junte que ce dernier voudrait récupérer.

Tous les sénateurs thaïlandais ont été nommés par une autre junte, celle du général Prayut qui a fomenté un coup d'état en 2014.

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BANGKOK 02 avril 2023 07:22
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